Nouvelles de la CSILC

Lutter contre l’ingérence sans bafouer les droits

Crédit : André Querry

Écrit par Tim McSorley, Coordonnateur national, Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles

Traduit par Barbara Ulrich, traductrice

Originellement publié dans le numéro de décember 2024 “Imaginer une ville des droits humains” de la revue Droits et libertés de La Ligue des droits et libertés. Abonnez-vous ou procurez-vous un exemplaire ici.


Des inquiétudes entourant l’ingérence étrangère continuent à faire les manchettes au Québec et à travers le Canada, suscitant l’examen approfondi, la controverse et les appels à agir aussi rapidement que possible afin de remédier à ce que les agences nationales de sécurité ont nommé de façon hyperbolique une menace existentielle pour le Canada.

Il y a de toute évidence des incidences d’ingérence étrangère qui soulèvent des préoccupations urgentes. À titre d’exemple, les révélations que les membres de la communauté Sikh au Canada ont été des cibles d’harcèlement, de violence et même de meurtre par des agent-e-s du gouvernement indien et d’autres menaces transnationales de répression envers des activistes de droits de la personne et leurs familles au Canada.

Cependant, ce débat a été trop caractérisé par la xénophobie, le racisme, la partisanerie politique, la surenchère ainsi que la précipitation à promulguer de nouvelles lois sévères étendues. Certaines de ces lois auront non seulement des retombées significatives sur les droits humains au Canada, y compris la liberté d’expression et d’association, mais également sur la contestation et la dissidence, la coopération et la solidarité internationale, la liberté académique et la liberté de presse.

Ceci est dû en grande partie à des renseignements secrets divulgués par des sources anonymes dont l’exactitude et la source soulèvent des questions de crédibilité. Une partie de ceux-ci a été examinée par l’Enquête publique sur l’ingérence étrangère, mais, puisque le rapport final tarde à se faire connaître, la crédibilité de ces fuites reste entière.

Des droits bafoués, encore une fois

Malgré ces questions restées en suspens, la réponse du gouvernement a été presque exclusivement axée sur l’octroi de nouveaux pouvoirs aux agences de sécurité nationales et dans la création de nouvelles infractions importantes, lesquelles entraîneront une réaction excessive et une hypersécurisation. Notre travail, depuis 2022, sur les incidences des lois sur la sécurité nationale et les luttes contre le terrorisme adoptées, témoigne de l’importance des définitions précises, des décisions basées sur des données probantes et des réponses qui sont nécessaires et proportionnelles.

Faire défaut d’adhérer à ces principes mine inévitablement les droits humains aussi bien que l’engagement et la participation démocratique. Ceci aura pour conséquence la marginalisation d’une diversité de communautés et d’organismes, notamment ceux des populations racisées, autochtones ou immigrantes et celles et ceux qui sont engagés dans la contestation, la dissidence et la remise en question du statu quo.

Loi adoptée à toute vitesse

L’exemple le plus flagrant est l’adoption précipitée de la Loi C-70 — la Loi sur la lutte contre l’ingérence étrangère — au mois de juin 2024, qui a entériné des changements aux systèmes canadiens de justice criminelle et de sécurité nationale.

Une loi d’une telle envergure aurait requis un examen approfondi. Cependant, dans la précipitation de légiférer sur les questions de l’ingérence étrangère aussi rapidement que possible, le projet de loi a été adopté par l’ensemble du processus législatif en moins de deux mois, presque du jamais vu.

À cause de la brièveté surprenante consacrée à la période d’étude, plusieurs aspects de cette législation n’ont pas été soumis à un examen et, par conséquent, des champs de préoccupation n’ont pas été pris en considération. Moins de temps voulait dire que les expert-e-s et les organismes ayant des ressources limitées ont dû précipiter leur analyse du projet de loi, rendant la soumission de mémoires et d’amendements appropriés presque impossible. Même lorsque les parlementaires et les sénateurs et sénatrices ont reconnu certaines préoccupations, le refrain était que l’étude du projet de loi ne pouvait pas être retardée afin d’adopter les nouvelles règles avant une prochaine élection potentielle, ce qui pourrait arriver à tout moment sous un gouvernement minoritaire.

Pouvoirs sans lien avec l’ingérence

À titre d’exemple, la Loi C-70 a changé la Loi sur le Service canadien du rensei­ gnement de sécurité (Loi sur le SCRS) en créant de nouveaux mandats plus facilement accessibles pour des perquisitions ponctuelles et la collecte secrète de renseignements à l’extérieur du Canada. Ces nouveaux pouvoirs doivent être approuvés par les tribunaux, mais ceci se passe à huis clos. Cela constitue une victoire pour le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) qui, depuis des années, contrevient aux lois existantes régissant les mandats, notamment en dupant les tribunaux. Des seuils élevés pour l’obtention des mandats secrets sont l’une des principales façons dont nos droits garantis par la Charte des droits et libertés sont protégés ; le projet de loi C-70 les a affaiblis.

Ceci n’est qu’un des multiples changements inscrits dans la Loi sur le SCRS, lesquels ne sont reliés qu’en partie à la lutte contre l’ingérence étrangère et pourront, en réalité, s’appliquer désormais à toute démarche de collecte de renseignements ou d’enquête qu’entreprend le SCRS.

Des défenseur-e-s des droits humains, des organismes de développement international et de solidarité, des politicien-ne-s, des académiques, des syndicalistes, des activistes environnementaux, des défenseur-e-s des terres autochtones, des journalistes et beaucoup d’autres parties prenantes au Canada travaillent directement avec des contreparties internationales au jour le jour. Un grand nombre de ces collègues internationaux peuvent travailler pour ou représenter des gouvernements, des entreprises d’État ou des entreprises affiliées, des fondations, des institutions académiques ou des médias, ou travaillent pour des organismes multilatéraux composés de gouvernements étrangers. Ces partenariats internationaux sont incontournables, aidant à proposer de nouvelles perspectives, faisant des avancés en recherche et en politiques, partageant le travail de Canadien-ne-s à l’international et en aidant à bâtir la coopération et la solidarité internationale.

Des impacts négatifs sur les droits

Cependant, dans sa réponse aux allégations d’ingérence étrangère, le gouvernement fédéral a introduit des règles qui auront presque certainement un effet négatif sur la liberté d’association avec des collègues internationaux, la liberté d’expression et la capacité des Canadien-ne-s de manifester et de contester.

La Loi C-70 a introduit des changements significatifs à la Loi sur la sécurité de l’information, qu’on appelle maintenant la Loi sur les ingérences étrangères et la sécurité de l’information1 (FISI). Il est alarmant de constater que la FISI prévoit des peines beaucoup plus sévères — jusqu’à l’emprisonnement à perpétuité — pour les infractions déjà prévues dans le Code criminel, notamment le harcèlement et l’intimidation, si elles sont commises sur l’ordre d’une entité étrangère, ou en collaboration ou pour son profit, ou, dans certains cas, avec un groupe terroriste2.

Un autre article troublant de la FISI se lit comme suit :

20.4 (1) Commet un acte criminel quiconque, sur l’ordre d’une entité étrangère ou en collaboration avec elle, a une conduite subreptice ou trompeuse en vue d’influencer un processus politique ou gouvernemental, la gouvernance scolaire, l’exercice d’un devoir en lien avec un tel processus ou une telle gouvernance ou l’exercice d’un droit démocratique au Canada.

Pour des définitions claires

Le problème, ici, n’est pas qu’elle vise à protéger les processus démocratiques, mais plutôt la façon dont elle tente de le faire. L’exemple le plus flagrant est le terme, « en collaboration avec », un terme vague qui n’est pas défini dans la législation. Il peut facilement vouloir dire, par exemple, qu’une personne qui collabore avec un individu ou un organisme qui travaille pour ou étroitement avec une entité étrangère (y compris non seulement des gouvernements, mais aussi des organismes indépendants financés par le gouvernement, ou même des organismes multilatéraux) sur des questions d’intérêt mutuel et, par la suite, lesquels s’impliquent pour changer une politique pourrait être vue en violation de la loi même si aucune influence véritable n’a été exercée par une entité étrangère. Le gouvernement dit également que de telles activités d’influence seraient illégales uniquement si clandestines. Mais, si vous n’agissez pas sous l’influence d’une entité étrangère, vous pourriez facilement croire que ce n’est pas nécessaire de divulguer votre association publiquement — donnant lieu à une violation possible de cette loi.

La définition de ce qui constitue un processus politique, la gouvernance scolaire et l’exercice d’un droit démocratique est également très vague. Même si le but de cette nouvelle loi est louable, sa formulation peut être une menace de graves répercussions à la liberté d’expression, protestation et manifestation.

Par exemple, prenons les campements universitaires en solidarité avec les Palestinien-ne-s et contre le génocide israélien à Gaza. Une de leurs revendications principales demandait aux administrations universitaires, lesquelles sont des institutions de gouvernance scolaire — de désinvestir  des  manufacturiers d’armements qui fournissent l’armée israélienne. Il s’agit de toute évidence d’une demande légitime visant à influencer une politique universitaire ; plus spécifiquement, il pourrait y avoir des appels au retrait de certains membres de conseil d’administration ou pour des étudiant-e-s à faire campagne auprès des associations étudiantes sur cette question. Cependant, il y avait des allégations non-fondées et fallacieuses que ces campements et ces campagnes étaient soit financés, soit coordonnés avec des gouvernements étrangers. Sous la Loi C-70, les forces de police et les agences de renseignement canadiennes seraient alors justifiées d’enquêter sur ces activistes, et, s’ils découvrent qu’une association dans laquelle n’importe quel individu ou organisme serait affilié avec un gouvernement étranger, ils peuvent encourir des pénalités sérieuses. La même chose pourrait s’appliquer à celles et ceux qui luttent pour de meilleures conditions de travail, pour la justice environnementale, pour les droits autochtones et autres.

Surveillance accrue à prévoir

Il est important de ne pas attiser la peur, et ce n’est pas prévu que ces accusations soient imminentes d’aucune façon – mais elles sont absolument plausibles sous ces nouvelles lois. Malgré les assurances du gouvernement, nous ne savons tout simplement pas comment elles seront appliquées. Cependant, aussi longtemps que cette possibilité existe, elles peuvent mener à une surveillance accrue, aux menaces de représailles et, enfin, à un effet paralysant sur la liberté d’expression et autres droits humains.

Les préoccupations entourant « en collaboration avec » s’étendent également à la nouvelle Loi sur l’influence étrangère et la transparence3 (LTR), créant un Commissaire à l’influence étrangère et à la transparence et le très attendu Registre de l’influence étrangère et de la transparenceLe nouveau registre exigera que les individus et les organismes s’inscrivent au registre si sous la direction de ou en association avec un commettant étranger :

  • communique avec un-e titulaire de charge publique;
  • communique ou diffuse de l’information reliée au processus politique ou gouvernemental;
  • ou distribue de l’argent, des objets de valeur ou offre un service ou l’utilisation d’un lieu.

L’obligation de s’enregistrer est plus étendue que le processus décrit ci-dessus, car un commettant étranger est défini plus vaguement qu’une « entité étrangère » et comprend l’engagement d’une manière beaucoup plus élargie que pour des changements de politiques. Les pénalités sont beaucoup moins sévères et incluent des options de fournir aux individus des avis avant de formuler de telles accusations. Cependant, l’obligation de s’inscrire dans un registre « d’influence étrangère » lorsque l’on agit simplement en association avec un commettant étranger soulève des préoccupations similaires. Tout groupement au Canada qui peut travailler avec un État étranger ou organisme affilié — même s’il n’agit pas au nom de cet organisme étranger — devrait inscrire  publiquement  qu’il  agit  sous « l’influence étrangère. » Ceci a soulevé des préoccupations sérieuses dans d’autres pays. Aux États-Unis, par exemple, une loi similaire d’enregistrement a mené a des enquêtes non-fondées4 d’organismes environnementaux et à l’obligation d’au moins un organisme national d’environnement réputé de s’inscrire à titre « d’agent étranger. » Nous pouvons nous attendre à des résultats semblables au Canada, paralysant la libre expression, la libre association et la capacité de travailler avec des partenaires internationaux sur des causes sociales importantes.

La liberté d’expression sous pression

Finalement, la Loi C-70 a élargi les délits existants de sabotage sous le Code criminel pour inclure le délit d’ingérence dans une nouvelle catégorie étendue « d’infrastructure essentielle », qui comprend le transport, l’approvisionnement alimentaire, les activités gouvernementales, l’infrastructure financière, ou toute autre infrastructure prescrite par règlement. N’importe lequel de ceux-ci peut, à un moment donné, faire l’objet d’une manifestation ou subir les répercussions d’une manifestation qui pourrait perturber leurs activités. Bien que la nouvelle loi prévoie une exclusion pour les revendications, les manifestations d’un désaccord ou les protestations, cela s’applique uniquement si les individus n’ont pas l’intention de causer du tort.

Cela laisse une grande marge de manœuvre d’interpréter « l’intention » de la protestation. Par exemple, les défenseur-e-s des territoires autochtones ont créé des blocus des chemins de fer et des routes dans le cadre d’actes de désobéissance civile avec le but avoué de perturber l’activité économique afin de mettre de la pression sur des responsables gouvernementaux. Sachant que cette action pourrait, théoriquement, créer du tort, il ne serait pas farfelu d’imaginer que le gouvernement pourrait utiliser une telle loi pour criminaliser ces protestations avec une peine pouvant aller jusqu’à 10 ans. Il n’y a pas de doute que le public canadien pourrait mettre en question leur participation dans des activités de protestation puisque celles-ci pourraient être vues comme un crime plus sérieux de sabotage.

Au cours des prochains mois, le gouvernement établira les règlements et nommera le Commissaire à la transparence en matière d’influence étrangère, ayant une incidence sur la manière dont ces lois seront interprétées et mises en œuvre. Il est essentiel que le public et les groupements de société civile demeurent vigilants et poursuivent leur pression sur le gouvernement afin de ne pas sacrifier les droits humains au nom de combattre l’ingérence étrangère.


1 En ligne : https://laws-lois.justice.gc.ca/PDF/O-5.pdf

2 Ibid. 

3 En ligne : https://laws-lois.justice.gc.ca/fra/lois/F-29.2/

4 Nick Robinson, The regulation of foreign funding of nonprofits in a democracy, International Center for Not-for-Profit Law, février 2024. En ligne : https://www.icnl.org/wp-content/uploads/Regulation-of-Foreign-Funding-of-Nonprofits-Feb-2024-author-version.pdf

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Mémoire conjoint sur le projet de loi C-20 sur la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public

Aujourd’hui, le 21 octobre, aura lieu la dernière audience sur le projet de loi C-20, Loi établissant la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public et modifiant certaines lois et textes réglementaires, au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants.

Pour l’étude du comité sénatorial, la CSILC, aux côtés de huit autres importantes organisations de la société civile, a présenté un mémoire conjoint. Vous pouvez lire le mémoire dans son intégralité ici.

Plusieurs des signataires de ce mémoire conjoint en parleront cet après-midi au Sénat. Voici ce que nous défendons :

Nos organisations, qui possèdent des décennies d’expertise dans les domaines du droit de l’immigration et des réfugiés, du droit pénal, des droits de la personne, du droit international, des libertés civiles et de la sécurité nationale, unissent leurs efforts pour s’assurer que la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public (CETPP), qui sera créée par le projet de loi C-20, établisse un processus de responsabilisation efficace, indépendant, équitable et accessible, du début à la fin, relativement aux activités de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC).

Nous avons été ravis de constater que d’importants amendements ont été proposés lors de l’examen du projet de loi C-20, Loi établissant la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public et modifiant certaines lois et textes réglementaires par le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes. Cependant, des amendements supplémentaires sont nécessaires pour assurer l’efficacité du projet de loi.

Ces amendements doivent :

  1. assurer l’accès et éliminer les obstacles pour les plaignants et leurs défenseurs;
  2. permettre les plaintes au sujet des modèles de comportement;
  3. exiger que la Commission enquête sur les plaintes graves;
  4. permettre à la Commission de recommander des mesures de protection provisoires et d’assurer les recours contre les plaintes fondées;
  5. supprimer les restrictions relatives au contrôle judiciaire.

Nos organisations ont proposé d’apporter au projet de loi C-20 des amendements qui répondraient aux préoccupations énoncées à l’annexe A. L’annexe B présente les amendements proposés au projet de loi.

SIGNÉ PAR :
Amnesty International Canada (section anglaise)
British Columbia Civil Liberties Association
Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés
Association canadienne des libertés civiles
Conseil canadien pour les réfugiés
Association canadienne des avocats en immigration
Association canadienne des avocats musulmans
Canadian Muslim Public Affairs Council
Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles

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Une Coalition canadienne de défense des libertés civiles dénonce et appelle à la fin de la liste des entités terroristes

ACTION

Le mardi 15 octobre 2024, le gouvernement canadien a inscrit le Réseau de solidarité avec les prisonniers palestiniens Samidoun sur la liste des entités terroristes du Canada.

Bien qu’il s’agisse ostensiblement d’un outil destiné à protéger la sécurité des personnes au Canada et dans le monde, la liste des entités terroristes est un outil politique arbitraire qui porte atteinte à la liberté d’association, à la liberté d’expression et à l’application régulière de la loi (due process) devant les tribunaux. Son efficacité en tant qu’outil de sécurité nationale n’a jamais été démontrée d’une manière qui justifie son utilisation.

En raison des profondes lacunes de la procédure d’inscription sur la liste des entités terroristes, la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles (CSILC) n’a cessé de demander l’abolition de ce régime depuis la création de la coalition canadienne en 2002.

L’inscription d’une organisation sur la liste est un processus secret et discrétionnaire par lequel le gouvernement peut prendre en compte n’importe quelle information, y compris des renseignements non vérifiés. L’inscription sur la liste permet au gouvernement de contourner les poursuites pénales ou les procès, plaçant le fardeau sur l’entité inscrite de contester les informations en question, dont la plupart sont tenues secrètes pour des « raisons de sécurité ». Il n’existe pas non plus de procédure cohérente pour contester une telle inscription à cette liste. Il en résulte une violation effective du principe de l’application régulière de la loi (due process) et de la présomption d’innocence.

Les conséquences de l’inscription sur la liste sont graves. Les avoirs sont gelés, toute utilisation de biens appartenant à l’organisation inscrite sur la liste ou contrôlés par elle constitue un délit, de même que la fourniture de toute forme de soutien financier ou en nature. De plus, l’inscription sur la liste stigmatise l’organisation et toute personne accusée d’y être associée en la qualifiant de « terroriste », quelles que soient ses actions personnelles, sans qu’il soit nécessaire de porter des accusations criminelles ou de prouver sa culpabilité devant un tribunal.

Dans les 24 heures qui ont suivi cette annonce, des appels ont déjà été lancés sur les médias sociaux pour qualifier de terroristes ou de partisans du terrorisme toute personne assistant à un événement ou s’associant à des personnes liées à Samidoun.

Comme il est illégal de soutenir une entité inscrite sur la liste de quelque manière que ce soit, y compris financièrement, cela signifie que l’organisation ne peut pas collecter de fonds ou payer un-e avocat-e pour organiser sa défense et contester l’inscription sur la liste des terroristes devant un tribunal. Il est donc extrêmement difficile, voire impossible, d’être retiré de la liste, ce qui constitue une fois de plus une violation du droit à un procès équitable.

La liste des entités terroristes est un instrument politique, souvent utilisé de manière discrétionnaire pour servir les intérêts géopolitiques du Canada et de ses alliés.

Historiquement, la liste sert à détourner l’attention de la violence exercée par les gouvernements sur leurs propres populations et sur les populations d’autres pays, par le biais de l’action militaire et de la répression par les forces de sécurité nationales et de la police, comme cela a été le cas pendant la longue « guerre contre le terrorisme ». Cette liste renforce la politique de deux poids deux mesures qui consiste à autoriser la violence et la répression des libertés civiles, au nom de la lutte contre le terrorisme, de la part du Canada et de ses alliés, tout en criminalisant les réactions à cette violence, ou même les critiques pacifiques de cette violence.

Si le gouvernement canadien estime que des organisations et des individus représentent une menace pour le public, ces preuves doivent être présentées en audience publique, où les accusé-es peuvent se défendre de manière appropriée contre les accusations.

La CSILC réitère son appel à l’abolition du régime de la liste des entités terroristes du Canada. L’utilisation de processus d’inscription secret doit cesser.


La CSILC est une coalition nationale de 44 organisations canadiennes de la société civile : ONG, syndicats, associations professionnelles, groupes confessionnels, organisations environnementales, de défense des droits humains et des libertés civiles, ainsi que de groupes représentant les communautés d’immigrant-es et de réfugié-es au Canada. Notre mandat est de défendre les libertés civiles et les droits humains dans le contexte de la soi-disant « guerre contre le terrorisme ».

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