Author Archives: ICLMG CSILC

Ralph Goodale effacera-t-il l’héritage honteux de Vic Toews?

202274_torture_philippines

Par Monia Mazigh – Immédiatement après 9/11, Alan Dershowitz, un avocat américain bien connu et controversé, a suscité l’indignation parmi les organisations des droits de la personne quand il a publié un article dans le San Francisco Chronicle intitulé “Vous voulez torturer? Obtenez un mandat». Dans son article, Dershowitz fait valoir que le gouvernement pourrait recourir à la torture (il a précisé qu’elle devrait être non létale) dans le contexte d’un “scénario de bombe à retardement”. En un mot, son argument est que l’on peut tolérer l’utilisation d'”un certain type de torture” si cela sauvera le vie de centaines de milliers de personnes.

Je ne suis pas d’accord avec cet argument car je crois fermement que la torture ne peut jamais être justifiée, le viol non plus, ou tout autre type de brutalité, peu importe que l’on considère “légitimes” ou “séduisantes” les raisons utilisées pour tenter de la justifier.

Au Canada, le débat entourant la torture nous parvint d’abord à travers la participation du Canada dans la guerre en Afghanistan avec les programmes de transfert de détenus et l’usage de la torture par les forces afghanes sous les ordres de l’armée canadienne. Et ce n’est pas tout. En 2011, Vic Toews, ministre de la Sécurité publique à l’époque, a envoyé des directives ministérielles au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), en leur donnant le pouvoir d’utiliser et de partager le renseignement même s’il avait probablement été arraché sous la torture.

Comme l’argument machiavélique de Dershowitz, l’utilisation de la torture ne sera pas officiellement tolérée, mais Vic Toews fait en sorte de parler, “que la protection de la vie et des biens sont les principaux facteurs au moment de décider de l’utilisation de l’information”. Oubliant ainsi que cette information a peut-être été obtenue sous la torture.

Un an plus tard, Vic Toews a progressé dans ses tentatives visant à légaliser la torture en envoyant des mémos semblables à la GRC et à l’ASFC.

Les directives presque identiques permettent à ces agences de partager des informations obtenues par la torture. Une fois de plus, le “scénario de la bombe à retardement” est évoqué. La différence ici est qu’il question de “circonstances exceptionnelles” et la justification est “afin d’atténuer un risque sérieux de perte de vie, des blessures ou des dommages substantiels ou destruction de biens avant qu’ils se concrétisent.”

La semaine dernière, Ralph Goodale, le nouveau ministre de la Sécurité publique, a déclaré que ces directives controversées adoptées par le gouvernement précédent seront examinées. La nouvelle n’a pas attiré beaucoup d’attention.

Je crois que cela est l’une des actions les plus prometteuses et courageuses prises jusqu’ici par le gouvernement. Les «mémos sur la torture” canadiens seront-ils retirés? Cet héritage honteux de l’utilisation des informations extraites de la torture sera-t-il stoppé et inversé ou est-ce trop tard? L’été dernier, les médias ont rapporté que le SCRS a obtenu le feu vert d’un comité interne de haut niveau pour interviewer un Canadien détenu à l’étranger aussi longtemps que les autorités étrangères aient donné des «assurances appropriées” que le détenu ne serait pas maltraité. Bien sûr, nous savons que des «assurances appropriées” similaires ont été également données par les Etats-Unis quand ils ont envoyé Maher Arar aux geôliers syriens. Et bien sûr, nous savons aujourd’hui qu’il a fini par être torturé et les assurances étaient sans valeur. Nous allons certainement continuer à suivre cette question.

Sources:

http://www.cbc.ca/news/canada/rcmp-border-agents-can-use-torture-tainted-information-1.1161388

http://www.huffingtonpost.ca/2016/01/19/troubling-conservative-torture-policy-up-for-review-goodale-says_n_9016126.html

http://www.cbc.ca/news/politics/csis-relied-on-no-torture-assurances-from-foreign-agencies-memo-reveals-1.3136825

La Charte de protection des Canadiens détenus à l’étranger

Charte de protection

La CSILC appuie la Charte de protection aux côtés de nombreux individus et organisations

Amnesty International & Fahmy Foundation – Certains cas de Canadiens détenus à l’étranger ont reçu un fort appui sur le plan politique alors que d’autres n’en ont reçu pratiquement aucun. Certains cas ont été compliqués ou minés par l’implication, voire la complicité, d’organismes canadiens chargés de la sécurité nationale ou de l’exécution des lois. Dans d’autres cas, la réponse du Gouvernement canadien a semblé mitigée en raison de liens économiques, stratégiques ou politiques étroits avec le gouvernement étranger en question. Dans quelques dossiers, les options canadiennes ont été limitées à cause de relations difficiles avec le gouvernement étranger. Il existe une perception croissante, selon laquelle les Canadiens dont les droits fondamentaux sont violés à l’étranger reçoivent moins de soutien politique que d’autres en raison de leurs profils personnels, familiaux, politiques ou religieux.

Dernièrement, le cas de Mohamed Fahmy, emprisonné injustement en Égypte en raison de son travail de journaliste, a mis en lumière le besoin criant de réformer et de renforcer les lois, les politiques et pratiques qui orientent les mesures prises par le Gouvernement canadien dans des cas semblables. En effet, le Gouvernement canadien a souvent failli à son devoir de faire des pressions au nom de M. Fahmy et de signaler son cas à de plus hautes instances. En conséquence, la détention de M. Fahmy a été prolongée. De plus, en raison des délais d’obtention d’un traitement médical nécessaire en prison, M. Fahmy souffre maintenant d’une invalidité permanente au bras.

Le besoin de réforme est urgent. M. Fahmy est de retour en sécurité au Canada, mais plusieurs autres personnes demeurent emprisonnées injustement, risquent d’être exécutées, ont été torturées ou pourraient l’être de nouveau, ou risquent de subir d’autres violations de leurs droits, en ce moment même.

Cette charte est présentée au Gouvernement canadien pour l’inciter à s’engager dans un processus de réformes en 2016, qui changeront les pratiques, réviseront les politiques et modifieront les lois, le tout en vue d’accroître les efforts déployés pour protéger les citoyens canadiens, les résidents permanents et les personnes entretenant des liens étroits avec le Canada qui subissent des violations graves à leurs droits fondamentaux à l’étranger.

Les 12 points de la Charte de protection :

1 Enchâsser le droit à l’aide consulaire et au traitement égal dans le droit canadien

2 Développer des critères transparents en matière d’aide consulaire

3 Protéger les journalistes canadiens à l’étranger

4 Défendre activement la nationalité canadienne

5 Empêcher que des lois ou des pratiques étrangères injustes dissuadent les actions du Canada

6 Créer un bureau indépendant pour examiner l’aide consulaire

7 Être constant pour demander la clémence en ce qui a trait à la peine de mort

8 Instituer l’examen et la supervision des organismes de sécurité nationale canadiens

9 Après la libération : l’accès à la justice et la liberté de mouvement

10 Ratifier le Protocole facultatif à la Convention contre la torture

11 Développer un réseau intergouvernemental

12 Établir des lignes directrices pour les résidents permanents et les personnes entretenant des liens étroits avec le Canada

Lisez la Charte de protection complète ici.

La CSILC exige des mécanismes solides de surveillance et d’examen pour les agences de sécurité nationale du Canada

De nombreuses agences canadiennes de sécurité nationale – incluant le CSTC, le SCRS, la GRC et l’ASFC – disposent de mécanismes de surveillance ou d’examen inadéquats ou n’en ont tout simplement pas. Cela a conduit à des violations des droits de la personne telles que le renvoi vers la torture des citoyens canadiens Maher Arar, Abdullah Almalki, Ahmad El Maati et Muayyed Nurredin, entre autres.

En 2006, le juge O’Connor a conclu la Commission Arar avec plusieurs recommandations afin d’empêcher que de telles atrocités ne se reproduisent : les organismes canadiens de sécurité nationale doivent être soumis à des mécanismes de surveillance et d’examen robustes, intégrés et complets.

Les années ont passé et le gouvernement fédéral n’a toujours pas mis en œuvre les recommandations. Voici ce que vous pouvez faire :

AGISSEZ MAINTENANT

Envoyez une lettre (on peut écrire aux députés sans frais de poste) :

Ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale
Chambre des communes
Ottawa (Ontario)
Canada
K1A 0A6

Ou un courriel: ralph.goodale@parl.gc.ca

Modèle de lettre

Cher ministre Goodale,

Je vous écris aujourd’hui afin d’exhorter le gouvernement libéral à agir dans les dossiers suivants:

  • Abroger la Loi antiterroriste de 2015 (projet de loi C-51)
  • Rendre la liste d’interdiction de vol (no-fly list) ouverte, transparente et responsable
  • Veiller à ce que la surveillance des Canadien.nes soit interdit
  • Mettre en œuvre les mécanismes de surveillance et de contrôle tel que recommandé par le juge O’Connor dans la Commission Arar
  • Ne pas accorder de plus grands pouvoirs au SCRS

Merci,

****

Pour en savoir plus sur la différence entre les mécanismes de surveillance et d’examen, et sur les agences de sécurité nationale du Canada et les organismes chargés de leur examen, le cas échéant, cliquez ici.

Puisque vous êtes ici…

… nous avons une faveur à vous demander. À la CSILC, nous travaillons sans relâche afin de protéger et promouvoir les droits humains et les libertés civiles dans le contexte de la soi-disant “guerre au terrorisme” au Canada. Nous ne recevons aucune aide financière des gouvernements municipaux, provinciaux et fédéral, ni d’aucun parti politique. Tout don nous aidera à poursuivre notre travail.

Vous hésitez à donner? Consulter la page sur nos nombreuses Réalisations et Acquis depuis 2002. Merci de votre générosité!