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Mémoire conjoint sur le projet de loi C-20 sur la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public

Credit: CBSA

Aujourd’hui, le 21 octobre, aura lieu la dernière audience sur le projet de loi C-20, Loi établissant la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public et modifiant certaines lois et textes réglementaires, au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants.

Pour l’étude du comité sénatorial, la CSILC, aux côtés de huit autres importantes organisations de la société civile, a présenté un mémoire conjoint. Vous pouvez lire le mémoire dans son intégralité ici.

Plusieurs des signataires de ce mémoire conjoint en parleront cet après-midi au Sénat. Voici ce que nous défendons :

Nos organisations, qui possèdent des décennies d’expertise dans les domaines du droit de l’immigration et des réfugiés, du droit pénal, des droits de la personne, du droit international, des libertés civiles et de la sécurité nationale, unissent leurs efforts pour s’assurer que la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public (CETPP), qui sera créée par le projet de loi C-20, établisse un processus de responsabilisation efficace, indépendant, équitable et accessible, du début à la fin, relativement aux activités de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC).

Nous avons été ravis de constater que d’importants amendements ont été proposés lors de l’examen du projet de loi C-20, Loi établissant la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public et modifiant certaines lois et textes réglementaires par le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes. Cependant, des amendements supplémentaires sont nécessaires pour assurer l’efficacité du projet de loi.

Ces amendements doivent :

  1. assurer l’accès et éliminer les obstacles pour les plaignants et leurs défenseurs;
  2. permettre les plaintes au sujet des modèles de comportement;
  3. exiger que la Commission enquête sur les plaintes graves;
  4. permettre à la Commission de recommander des mesures de protection provisoires et d’assurer les recours contre les plaintes fondées;
  5. supprimer les restrictions relatives au contrôle judiciaire.

Nos organisations ont proposé d’apporter au projet de loi C-20 des amendements qui répondraient aux préoccupations énoncées à l’annexe A. L’annexe B présente les amendements proposés au projet de loi.

SIGNÉ PAR :
Amnesty International Canada (section anglaise)
British Columbia Civil Liberties Association
Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés
Association canadienne des libertés civiles
Conseil canadien pour les réfugiés
Association canadienne des avocats en immigration
Association canadienne des avocats musulmans
Canadian Muslim Public Affairs Council
Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles

Puisque vous êtes ici…

… nous avons une faveur à vous demander. À la CSILC, nous travaillons sans relâche afin de protéger et promouvoir les droits humains et les libertés civiles dans le contexte de la soi-disant “guerre au terrorisme” au Canada. Nous ne recevons aucune aide financière des gouvernements municipaux, provinciaux et fédéral, ni d’aucun parti politique.Vous pouvez devenir notre mécène sur Patreon et recevoir des récompenses en échange de votre soutien. Vous pouvez donner aussi peu que 1$ par mois (c’est seulement 12$ par année!) et vous pouvez vous désabonner en tout temps. Tout don nous aidera à poursuivre notre travail.support-usVous pouvez également faire un don unique ou donner mensuellement par Paypal en cliquant sur le bouton ci-dessous. Vous hésitez à donner? Consulter la page sur nos nombreuses Réalisations et Acquis depuis 2002. Merci de votre générosité!

Une Coalition canadienne de défense des libertés civiles dénonce et appelle à la fin de la liste des entités terroristes

ACTION

Le mardi 15 octobre 2024, le gouvernement canadien a inscrit le Réseau de solidarité avec les prisonniers palestiniens Samidoun sur la liste des entités terroristes du Canada.

Bien qu’il s’agisse ostensiblement d’un outil destiné à protéger la sécurité des personnes au Canada et dans le monde, la liste des entités terroristes est un outil politique arbitraire qui porte atteinte à la liberté d’association, à la liberté d’expression et à l’application régulière de la loi (due process) devant les tribunaux. Son efficacité en tant qu’outil de sécurité nationale n’a jamais été démontrée d’une manière qui justifie son utilisation.

En raison des profondes lacunes de la procédure d’inscription sur la liste des entités terroristes, la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles (CSILC) n’a cessé de demander l’abolition de ce régime depuis la création de la coalition canadienne en 2002.

L’inscription d’une organisation sur la liste est un processus secret et discrétionnaire par lequel le gouvernement peut prendre en compte n’importe quelle information, y compris des renseignements non vérifiés. L’inscription sur la liste permet au gouvernement de contourner les poursuites pénales ou les procès, plaçant le fardeau sur l’entité inscrite de contester les informations en question, dont la plupart sont tenues secrètes pour des « raisons de sécurité ». Il n’existe pas non plus de procédure cohérente pour contester une telle inscription à cette liste. Il en résulte une violation effective du principe de l’application régulière de la loi (due process) et de la présomption d’innocence.

Les conséquences de l’inscription sur la liste sont graves. Les avoirs sont gelés, toute utilisation de biens appartenant à l’organisation inscrite sur la liste ou contrôlés par elle constitue un délit, de même que la fourniture de toute forme de soutien financier ou en nature. De plus, l’inscription sur la liste stigmatise l’organisation et toute personne accusée d’y être associée en la qualifiant de « terroriste », quelles que soient ses actions personnelles, sans qu’il soit nécessaire de porter des accusations criminelles ou de prouver sa culpabilité devant un tribunal.

Dans les 24 heures qui ont suivi cette annonce, des appels ont déjà été lancés sur les médias sociaux pour qualifier de terroristes ou de partisans du terrorisme toute personne assistant à un événement ou s’associant à des personnes liées à Samidoun.

Comme il est illégal de soutenir une entité inscrite sur la liste de quelque manière que ce soit, y compris financièrement, cela signifie que l’organisation ne peut pas collecter de fonds ou payer un-e avocat-e pour organiser sa défense et contester l’inscription sur la liste des terroristes devant un tribunal. Il est donc extrêmement difficile, voire impossible, d’être retiré de la liste, ce qui constitue une fois de plus une violation du droit à un procès équitable.

La liste des entités terroristes est un instrument politique, souvent utilisé de manière discrétionnaire pour servir les intérêts géopolitiques du Canada et de ses alliés.

Historiquement, la liste sert à détourner l’attention de la violence exercée par les gouvernements sur leurs propres populations et sur les populations d’autres pays, par le biais de l’action militaire et de la répression par les forces de sécurité nationales et de la police, comme cela a été le cas pendant la longue « guerre contre le terrorisme ». Cette liste renforce la politique de deux poids deux mesures qui consiste à autoriser la violence et la répression des libertés civiles, au nom de la lutte contre le terrorisme, de la part du Canada et de ses alliés, tout en criminalisant les réactions à cette violence, ou même les critiques pacifiques de cette violence.

Si le gouvernement canadien estime que des organisations et des individus représentent une menace pour le public, ces preuves doivent être présentées en audience publique, où les accusé-es peuvent se défendre de manière appropriée contre les accusations.

La CSILC réitère son appel à l’abolition du régime de la liste des entités terroristes du Canada. L’utilisation de processus d’inscription secret doit cesser.


La CSILC est une coalition nationale de 44 organisations canadiennes de la société civile : ONG, syndicats, associations professionnelles, groupes confessionnels, organisations environnementales, de défense des droits humains et des libertés civiles, ainsi que de groupes représentant les communautés d’immigrant-es et de réfugié-es au Canada. Notre mandat est de défendre les libertés civiles et les droits humains dans le contexte de la soi-disant « guerre contre le terrorisme ».

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La mobilisation internationale contre la surveillance

Crédit: Vicente Méndez

Par Maureen Webb

2005 : Campagne internationale contre la surveillance globale

En 2005, à Ottawa, la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles (CSILC) a organisé un sommet réunissant des ONG du monde entier afin de discuter des préoccupations liées aux mesures de plus en plus mondialisées prises par les gouvernements dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme ».

Grâce aux relations nouées au fil des ans par Roch Tassé (le premier coordonnateur national de la CSILC) et Brian Murphy (un membre de son comité directeur), cette rencontre a regroupé des acteurs importants, notamment Statewatch de l’UE, Walden Bello et son groupe Focus on the Global South, l’American Civil Liberties Union, le Center for Constitutional Rights des États-Unis et la Ligue des droits et libertés du Québec. Ces organismes se sont réunis à Ottawa pendant quatre jours pour y mener des discussions approfondies sur ce qui se passe sur leurs territoires respectifs.

Nous avons constaté que les gouvernements adoptent des mesures similaires, de manière coordonnée et en étroite collaboration, par l’intermédiaire d’organismes supranationaux opaques et non imputables, dans le but de mettre en place des dispositifs sans aucun débat démocratique à l’échelon national. Et nous avons estimé que les éléments de ce schéma – ce nouveau tournant sombre dans la gouvernance mondiale – devaient être reliés, compris et contrés à l’échelle internationale par une coalition mondiale de groupes locaux de la société civile.

Cette semaine-là, le travail accompli fut déterminant, car en nous réunissant depuis nos pays respectifs, nous avons pu identifier la « guerre au terrorisme » pour ce qu’elle est, une prise de pouvoir coordonnée et antidémocratique, préparant le terrain pour l’érosion de la souveraineté et des droits constitutionnels garantis à l’échelle nationale, au cours des décennies à venir.

On peut conclure que le complexe mondial industriel de surveillance a mis au point son scénario et son infrastructure pendant les années de guerre contre le terrorisme, et qu’il a réussi à convaincre les populations de se retourner contre « l’Autre » – encore maintenant, les musulman⋅es et, dans de nombreux pays, les opposant⋅es politiques. Au cours des trois dernières années, ce même complexe industriel de surveillance a expérimenté la mise en place d’un scénario et d’une infrastructure similaires pour « le reste d’entre nous ». Des mesures ont été prises pour faire de la carte d’identité numérique et de la monnaie numérique de banque centrale les fondements d’une nouvelle économie. Le complexe a remporté un succès inquiétant en incitant les gens à adopter le type de systèmes « d’incitatifs » et de « crédit social » qui transformeront nos démocraties en société de surveillance de plus en plus verrouillée et contrôlée. Même si un grand nombre de personnes ont négligé ce phénomène, ceulles d’entre nous qui luttent depuis vingt ans contre les excès de la surveillance en matière de sécurité nationale reconnaîtront aisément les antécédents et les dangers de ce régime émergent.[1]

Pendant les quatre jours du sommet, nous avons conçu et endossé une campagne internationale contre la surveillance globale (CICSG) – mieux connue sous l’acronyme anglais ICAMS – pour laquelle Ben Hayes de Statewatch et moi-même avons rédigé l’analyse centrale.

Soutenue par les organisations présentes au sommet, la campagne a été lancée simultanément en avril 2005 à San Francisco, Ottawa et Londres. Elle a ensuite été présentée au Forum social mondial de Porto Alegre. Près de 300 organisations de la société civile ont signé le Manifeste de la CICSG au cours de l’année suivante.

Les personnes qui ont participé au sommet de 2005 sont devenues de proches collègues, collaboratrices ainsi que des conseillères de confiance de la CSILC. Nombre d’entre elles étaient de retour à Ottawa quelques années plus tard pour participer à un colloque d’expert⋅es de l’international organisé par la CSILC et la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa. Ce colloque avait pour but de rédiger les Principes d’Ottawa, une codification des principaux domaines du droit international relatifs aux mesures antiterroristes prises par les gouvernements. L’un des enseignements tirés de la démarche du Sommet de 2005 est que rien ne remplace les relations de travail en personne. La venue à Ottawa de représentant⋅es de chacun de ces groupes a constitué un investissement qui s’est avéré fructueux dans les années à venir.

2006 : Conférence internationale des Commissaires à la protection de la vie privée

En 2006, à Montréal, Roch Tassé et Patricia Poirier ont organisé le Forum de la société civile qui s’est tenu parallèlement à la Conférence internationale des commissaires à la protection de la vie privée. Les recommandations du Forum ont repris le contenu du Manifeste de la CICSG. En 2009, à Madrid, le Manifeste a été largement adopté lors des séances de la société civile de la Conférence internationale des commissaires à la protection de la vie privée. Il a été reformulé sous le titre de Déclaration de Madrid sur les normes mondiales de protection de la vie privée dans un monde global.

2007 : L’illusion sécuritaire

De 2005 à 2006, j’ai écrit un livre fondé sur l’analyse de la CICSG, L’illusion sécuritaire : Fichage, torture… personne n’est à l’abri (traduction de Illusions of Security: Global Surveillance and Democracy in the Post -9-11 World). Ce livre a été publié en 2007 par la maison d’édition City Lights de San Francisco. En écrivant ce livre, j’espérais influencer davantage les politiques gouvernementales et sensibiliser les citoyen⋅nes aux questions de surveillance dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme ».

J’ai accordé des entrevues à Democracy Now!, à l’émission The National de la CBC avec Peter Mansbridge, à BBC’s World Service, à Chicago Public Radio, à Air America, au Ottawa Citizen, à la Montreal Gazette, à la télévision mexicaine, à El Periodico de Barcelone, au Winnipeg Free Press, et même au magazine Playboy. Pour vous donner une idée de la portée de mon message, j’ai notamment pris la parole devant le Chicago Council on Global Affairs, le World Affairs Council of California, le congrès international de l’Association canadienne pour les études sur la sécurité et le renseignement (à laquelle ont participé le Service canadien du renseignement de sécurité, le MI5 du Royaume-Uni, et le FBI et la CIA des États-Unis), la Conférence mondiale sur le journalisme d’investigation, certains festivals de cinéma et de nombreuses universités.

Une grande partie de ce qui avait été prédit en 2005 sur la surveillance mondiale, dans le cadre de la CICSG, et en 2007 dans mon livre, s’est avérée et fut confirmée lors des révélations de Snowden en 2013. Par ailleurs, rappelons que la technologie de surveillance a fait des progrès considérables depuis. Ainsi, les systèmes d’identification numérique que nous avons observés pendant la pandémie et dans les récents plans de gouvernance mondiale constituent, à mon avis, le combat du siècle pour les libertés civiles.


Maureen Webb est avocate en droit constitutionnel et droits de la personne. Elle a écrit Coding Democracy (MIT Press, 2020) et Illusions of Security (City Lights, 2007). mitpress.mit.edu/author/maureen-webb-28478 & ubc.academia.edu/MaureenWebb

Note de bas de page

[1] Centre pour les droits humains et la justice mondiale, « Paving a Digital Road to Hell? A Primer on the Role of the World Bank and Global Networks in Promoting Digital ID » (Paver la voie de l’enfer numérique? Une introduction au rôle de la Banque mondiale et des réseaux mondiaux dans la promotion de l’identification numérique), NYU School of Law, juin 2022.

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