Nouvelles de la CSILC

LRWC & CSILC sur la réponse du Canada au Comité des Nations Unies contre la torture dans l’affaire d’Omar Khadr

À l’attention du Programme des droits de la personne du ministère du Patrimoine canadien:

Après la sixième évaluation de la performance du Canada à l’égard de ses obligations en vertu de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (UNCAT), le Comité contre la torture (CAT), dans ses observations finales publiées le 25 juin 2012, a identifié 18 sujets de préoccupation et recommandations spécifiques afin d’apporter les corrections nécessaires pour que le Canada soit en conformité avec la UNCAT. […]

En juillet 2012, le CAT a recommandé, entre autres, que le Canada «veille à ce que [Omar Khadr] reçoive une réparation appropriée pour les violations des droits de la personne qu’il a vécu, tel que statué par la Cour suprême du Canada» (par. 16 (b)). Dans la Liste des points à traiter avant soumission du rapport (LPT), par. 28 (b), le CAT pose la question « [Omar Khadr] a-t-il reçu une réparation adéquate pour les violations des droits humains qu’il a subi, tel qu’ordonné dans une décision rendue par la Cour suprême du Canada?»

LRWC et la CSILC demandent que le gouvernement du Canada, dans sa réponse à la LPT, traite le terme «réparation» comme englobant la gamme complète des obligations de l’article 14 identifiés par l’Observation générale n° 3 [5], y compris les devoirs d’enquêter pleinement la torture et les mauvais traitements qu’Omar Khadr a subis au cours de son emprisonnement, de punir les responsables, et d’adopter des mesures pour prévenir d’autres incidents, en conformité avec les dispositions de la convention contre la torture.

Le CAT, dans l’Observation générale n° 3 (par. 2), a déterminé que le terme «réparation» dans UNCAT à l’article 14 est un concept de réparation complet qui «implique la restitution, indemnisation, réadaptation, satisfaction et garanties de non-répétition et se réfère à la portée complète de la mesure nécessaire pour remédier aux violations de la Convention.» […]

LRWC et la CSILC restent préoccupés par l’incapacité persistante à prévenir, enquêter et punir la torture et les mauvais traitements qu’a subi Omar Khadr, qui ne constitue pas seulement une violation continue des droits d’Omar Khadr, mais encourage également et renforce le danger de la torture par les Etats et les acteurs non étatiques. Nous notons que le CAT dans l’Observation générale n° 3, par. 42, exprime sa préoccupation que l’impunité «empêche les victimes de demander une réparation complète car elle permet aux contrevenants de demeurer impunis et nie aux victimes la garantie de leurs droits en vertu de l’article 14.» […]

Le Canada a contrevenu à tous les aspects de ses obligations en vertu de la UNCAT dans le cas d’Omar Khadr. Pour remédier à ces importantes contraventions, le Canada doit adopter une loi pour créer un processus par lequel des plaintes peuvent être faites, pour assurer l’enquête sur les plaintes et la détermination et la mise en œuvre de réparation, la poursuite des auteurs présumés et la pleine réparation pour les victimes. Le Canada devra aussi développer un programme d’évaluation, d’éducation et de formation des fonctionnaires sur leurs devoirs en vertu de la UNCAT, y compris les juges, qui sont chargés de la responsabilité des personnes détenues. Le Canada devrait développer cette législation et ces programmes et politiques en consultation avec les organisations de la société civile ayant une expertise sur cette question.

LIRE LE RAPPORT COMPLET ICI (en anglais seulement)

[2] Examen des rapports présentés par les États parties en vertu de l’article 19 de la Convention – Observations finales du Comité contre la torture – Canada, CAT/C/CAN/CO/6, 25 juin 2012.

[5] Comité contre la torture (CAT), Observation générale n° 3, 2012: Convention contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants: la mise en œuvre de l’article 14 par les États parties, 13 décembre 2012, en ligne: http://www.refworld.org/docid/5437cc274.html [consulté le 16 décembre 2015]

Espoirs et défis pour 2016

Chers amis de la CSILC,

Ceci est mon dernier blog pour 2015. Cette année a été une année de montagnes russes pour tous ceux et celles qui travaillent à protéger les libertés civiles et les droits humains. La Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles a été vigilante et toujours constante dans son appel au respect des droits pour tous les Canadiens et Canadiennes sans exception.

Lutte contre le terrorisme ne doit jamais être une excuse pour éliminer ou limiter nos libertés civiles. Malheureusement, la nouvelle Loi antiterroriste de 2015, ou C-51 comme tout le monde l’appelle, a été adoptée cette année. Elle met grandement en danger nos droits civils et les rend vulnérables. Pendant ce temps, le gouvernement n’a toujours pas démontré comment cette nouvelle législation très envahissante rendra le Canada plus sécuritaire.

Fondamentalement, C-51 a donné au gouvernement le feu vert pour nous espionner sans mandat. Les agents du renseignement ont désormais d’énormes pouvoirs supplémentaires afin de “perturber” toutes les activités qu’ils soupçonnent d’être liées au terrorisme. Devinez ce que cela peut signifier: ils peuvent tout faire, sauf vous tuer ou vous agresser sexuellement. La promotion du terrorisme est désormais une infraction, même si aucun acte terroriste n’est planifié ou exécuté. Le fait d’exprimer une opinion forte soutenant ou qui pourrait être interprétée comme soutenant le terrorisme en général – indépendamment des intentions – est maintenant considéré comme un crime. La liberté d’expression est alors menacée.

La liste d’interdiction de vol a été officialisée et élargie. L’opacité entourant cette liste depuis sa création en 2007 demeure et a même été renforcée. C-51 permet des audiences judiciaires pouvant se produire hors de la vue du public et l’utilisation de preuves secrètes. Nous sommes toujours opposés à cette liste et nous demandons au gouvernement de la rendre publique.

L’ancien gouvernement canadien a activé les procédures d’expulsion contre Mohamed Harkat. Comment pouvons-nous expulser un homme vers un pays où il est confronté à un risque de torture, de disparition et de mort? Malheureusement, en 2015, le régime des certificats de sécurité demeure un système imparfait qui cible les immigrants et les réfugiés. Malgré ce que la Cour suprême a conseillé en termes d’informer un suspect, par l’entremise de son avocat spécial, des informations secrètes sur son cas, ce recours n’a pas été pris en compte et nous avons encore aujourd’hui un processus où un individu ne pourra jamais connaître la preuve retenue contre lui.

Omar Khadr a finalement été libéré de prison sous des conditions strictes. Sa longue détention à Guantanamo marque l’un des chapitres les plus sombres de l’histoire du Canada depuis 9/11. Il a été libéré malgré la bataille juridique continue que le gouvernement a menée contre lui. À trois reprises, la Cour suprême a statué en sa faveur et chaque fois le gouvernement n’a pas voulu écouter.

Le 19 octobre 2015, Justin Trudeau est devenu le nouveau Premier ministre du Canada, après une décennie de peur. Sous le gouvernement Harper, de nombreuses organisations de la société civile se sont senties intimidées. Certaines ont subi des vérifications fiscales abusives, tandis que d’autres ont perdu leur financement. Nous espérons vraiment que nous passerons à un nouveau chapitre en termes de responsabilité et de transparence. La société civile est un pilier de notre démocratie et toute attaque contre elle est une attaque contre la démocratie. Une enquête publique sur ces attaques devrait être lancée.

La route devant nous sera cahoteuse et pleine d’obstacles. Nous allons continuer à demander l’abrogation de C-51. Nous sommes déterminés à obtenir la mise en œuvre des recommandations du juge O’Connor dans le rapport de la Commission Arar: un contrôle parlementaire et des mécanismes d’examen robustes et intégrés. Le contrôle parlementaire ne suffit pas, des mécanismes d’examen sont cruciaux.

Nous appelons le gouvernement à présenter des excuses à Ahmed El Maati, Abdullah Almalki et Muayyed Nureddin et de les compenser. Ces trois hommes poursuivent le gouvernement fédéral pour sa complicité dans leur renvoi vers la torture et une date d’audience a été fixée pour 2016. Nous espérons que le gouvernement n’attendra pas jusque là et agira afin de réparer ce grave tort dès que possible.

Salim Alaradi, le citoyen canadien arrêté à l’été 2014, est toujours derrière les barreaux dans les Émirats arabes unis. Nous avons appris que son dossier a été envoyé au procureur général. Cela est profondément troublant, comme il n’a jamais été accusé d’aucun crime. Nous avons appelé plusieurs fois à sa libération immédiate. Human Rights Watch et Amnesty International ont documenté la torture qu’il a subi. Manifestement, le Canada n’en fait pas assez. La CSILC a appelé le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Dion, afin de demander sa libération immédiate et son retour au Canada.

Il y a beaucoup d’espoirs et de nombreux défis à venir. Nous comptons sur votre soutien et votre générosité afin que nous puissions bâtir un Canada et un avenir meilleur pour nos enfants.

Joyeuses fêtes de la part de la CSILC

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Quel est l’impact du fondamentalisme sur la liberté d’association et de réunion pacifique?

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Par Monia Mazigh, coordonnatrice nationale de la CSILC

Florence, Italie – Quel est l’impact du fondamentalisme sur la liberté d’association et de réunion pacifique? Voici la question à laquelle le Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté d’association et de réunion pacifique tentera de répondre dans son prochain rapport. M. Maina Kiai a organisé une réunion d’experts à Florence, en Italie afin de réfléchir sur cette question en particulier et de proposer quelques réponses. La Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles était présente pour représenter le Canada.

La discussion a débuté autour du mot «fondamentalisme». Même si l’intention de la discussion n’est pas de trouver LA définition du mot, il est important de l’examiner sous différents angles. Parlons-nous de l’intégrisme religieux? De fondamentalisme politique? Racial? Nationaliste? Certes, toutes ces formes sont à considérer.

Mais au-delà du type de fondamentalisme, nous serons plus intéressés par le côté “des auteurs” plutôt que du côté des victimes de la question. Ce sont les actions des groupes qui épousent et pratiquent l’idéologie de l’intégrisme qui exigera notre attention.

Il convient de mentionner que deux parties prenantes de l’intégrisme seront examinées:

  • L’État
  • Les acteurs non étatiques

Donc en ce qui concerne le Canada, est-ce que l’État pratique ou a pratiqué une ou plusieurs formes de fondamentalisme et si oui, quel a été son impact sur la liberté d’association et de réunion pacifique?

Au Canada pendant la dernière décennie, le précédent gouvernement Harper a joué un rôle principal et prédominant dans la violation des droits des individus et des groupes de la société civile en fondant son approche principalement sur une vision économiques néolibérale néo-conservatrice, ciblant les militants écologistes, les manifestants anti-pétrole, les activistes syndicaux, les militants pro-palestiniens et les groupes anti-austérité, et combinée à une idéologie xénophobe où les Musulmans, les réfugiés et les immigrants furent diabolisés.

Les acteurs non étatiques:

Les groupes non étatiques ont également été florissants et prospères dans ce contexte de la normalisation et l’institutionnalisation des attaques sur le droit d’association et de réunion pacifique.

Ces acteurs non étatiques peuvent être divisés en deux catégories. La ligne entre les deux catégories ne peut pas toujours être facilement établie:

  • Les extrémistes de droite
  • Les groupes ou sites Internet anti-musulmans

Rappelez-vous, le 19 septembre 2015, la première manifestation de PEGIDA tenue au Canada (en face de la législature de l’Ontario). Même si le rassemblement n’a pas été un énorme succès, et que les manifestants anti-racisme étaient plus nombreux que les manifestants appuyant PEGIDA, nous avons vu dans cet événement d’un incident troublant. Le mouvement a été encouragé dans sa rhétorique fondamentaliste par la crise des réfugié.es en Méditerranée qui a amené des centaines de milliers de Syrien.nes et autres réfugié.es dans l’Union européenne, et par le discours de plus en plus xénophobe adopté par le gouvernement Harper dans les dernières années, et qui a culminé au cours de l’élection fédérale.

En ce qui concerne les actions de l’Etat, il nous suffit d’observer toutes les instances de criminalisation systématique de la dissidence qui ont eu lieu depuis 2006 et qui a pris des formes multiples: intimidation, harcèlement par l’espionnage et la surveillance, attaques verbales sur des groupes autochtones, des militants écologistes et des militants syndicaux, profilage politique, arrestations d’étudiant.es, diabolisation des groupes et des individus musulmans, etc.

La liberté d’association et la liberté de réunion sont les piliers d’une société démocratique. Les attaquer ou essayer de les limiter peut avoir un effet contre-productif sur les droits individuels, mais aussi sur la société civile dans son ensemble. De nombreuses études suggèrent que la criminalisation de la “promotion du terrorisme”, par exemple tel qu’inclus dans la nouvelle loi antiterroriste (C-51), n’est pas le bon chemin à prendre afin de lutter contre le fondamentalisme. Permettre à ces “groupes fondamentalistes” d’opérer dans la lumière, tout en les ayant à l’oeil, est crucial afin de détecter quels sont les messages circulant entre les acteurs, aussi longtemps que les messages n’incitent pas explicitement à la haine ou la violence. De plus, les gouvernements ne peuvent permettre à certains groupes de s’exprimer, comme les extrémistes de droite, tout en criminalisant les individus ou les groupes qui sont opposés à la politique étrangère de l’Occident au Moyen-Orient, par exemple. La liberté d’expression devrait être pour tous et toutes.

L’Internet et les médias sociaux jouent un rôle énorme dans la diffusion de toutes sortes de messages: recruter de nouveaux membres pour les groupes fondamentalistes, diffuser des messages haineux et xénophobes, mais également diffuser des informations utiles pour dissuader les jeunes de rejoindre les groupes fondamentalistes, éduquer les gens, appeler les gens à participer à des rassemblements pacifiques, des campagnes publiques, etc.

Garder le bon côté de l’Internet et des médias sociaux en empêchant certains groupes haineux et fondamentalistes de les utiliser à leurs propres fins est extrêmement difficile, voire impossible.

Ce n’est pas en interdisant l’Internet ou en limitant la liberté d’expression que nous allons nous débarrasser des idées ou idéologie fondamentalistes. Le fondamentalisme a toujours existé et nous ne pouvons pas l’éliminer. Cependant, nous pouvons être plus vigilants. Le gouvernement a un rôle à jouer ici dans le système d’éducation. Les enfants devraient apprendre davantage sur l’Internet à partir de la maternelle même: ce qui est approprié, ce qui ne l’est pas. Ce qui est violent, ce qui ne l’est pas. Ce qui est respectueux, ce qui ne l’est pas. Le travail devrait certainement commencer par là.

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