Aujourd’hui, la CSILC a lu la déclaration suivante en conférence de presse sur la colline parlementaire aux côtés de Mohamed Harkat et un de ses avocats, du collectif Justice for Mohamed Harkat, et de Amnesty International et du NCCM, deux de nos membres.
En août 2015, le gouvernement fédéral a lancé une procédure d’expulsion contre Mohamed Harkat, 20 ans après son arrivée au Canada et après avoir réclamé le statut de réfugié.
Mohamed Harkat a été arrêté le 10 décembre 2002 – il y a 13 ans – en vertu d’un certificat de sécurité, et depuis il vit dans les limbes juridiques. Il a passé trois ans en prison, notamment à Guantanamo Nord, la prison de 3,2 millions de dollars construite spécialement pour les détenus musulmans. Depuis qu’il a été libéré, il a été soumis à des conditions extrêmement strictes d’assignation à domicile. Son épouse, Sophie Lamarche, est devenue sa geôlière « non officielle » à la maison, perdant ainsi ce qui restait de leur vie privée. Pendant de nombreuses années, il a dû porter un bracelet de surveillance électronique à la cheville pour contrôler tous ses mouvements.
En mai 2014, la Cour suprême du Canada a confirmé que le régime des certificats de sécurité était constitutionnel et a conclu que le certificat de sécurité contre Mohamed Harkat était raisonnable.
Toutefois, la Cour suprême a rappelé aux juges opérant sous la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés qu’ils devraient être « interventionnistes », et a clairement indiqué que le gouvernement ne pouvait pas procéder dans une audience entourant un certificat de sécurité, sauf si le suspect est raisonnablement informé de l’affaire contre lui pour assurer sa défense.
Malheureusement, aujourd’hui, aucune mesure n’a été prise par le gouvernement afin de permettre aux suspects d’accéder à la preuve secrète à leur encontre. Au contraire, le projet de loi C-51, la Loi antiterroriste adoptée en juin 2015, a renforcé l’utilisation du secret même dans les cas impliquant des citoyens canadiens et a abaissé le seuil et étendu les motifs pour les arrestations préventives.
Cette décision d’expulsion est la première étape d’une procédure qui enverra Mohamed Harkat de sa vie paisible au Canada vers la torture et très probablement la disparition et l’exécution.
Avant d’être renvoyé vers la torture, une évaluation du danger potentiel que représente M. Harkat auprès des Canadiens et Canadiennes doit être faite. Mais, vraiment, quelle menace Mohamed Harkat peut-il bien posée aujourd’hui?
La Cour suprême a jugé dans le passé que des suspects terroristes ne peuvent être expulsés que dans des «circonstances exceptionnelles» vers des pays où ils font face à un risque sérieux de torture.
Selon Amnistie internationale et Human Rights Watch, de graves violations des droits de la personne sont encore monnaie courante en Algérie. Le Canada peut-il vraiment accepter en toute bonne conscience les assurances diplomatiques qui lui seraient données pour déporter Mohamed Harkat vers l’Algérie? Nous croyons que non.
Aujourd’hui, nous demandons au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, l’honorable Ralph Goodale, de cesser immédiatement les procédures de déportation contre Mohamed Harkat. Nous ajoutons: Est-ce que ce gouvernement veut qu’on se souvienne de lui pour le renvoi d’un réfugié vers la torture ou l’exécution?
La CSILC estime que Mohamed Harkat doit être autorisé à rester au Canada avec son épouse. Après plus d’une décennie de combats juridiques, de « preuves » secrètes, de détresse physique et émotionnelle, il est temps de redonner à Mohamed ses droits et sa vie.
Merci.