Alors que les citoyen.nes de partout au Canada se rassemblent pour exprimer leurs inquiétudes face à la crise à Gaza, la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles (CSILC), représentant 46 organisations de la société civile canadienne, exhorte de toute urgence le gouvernement, les universités, les forces de l’ordre et d’autres responsables à respecter la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association, toutes garanties par la Charte canadienne des droits et libertés.
« La rhétorique récente de certains responsables et commentateurs, qui associe la critique du gouvernement israélien au soutien au terrorisme, porte non seulement atteinte aux principes de liberté d’expression, de réunion et d’association, mais menace également les libertés civiles des personnes qui participent à des manifestations pacifiques », a déclaré Tim McSorley, coordonnateur national de la CSILC. « De telles allégations infondées qualifient à tort l’expression politique légitime d’extrémisme dangereux, créant ainsi un effet dissuasif sur un dialogue ouvert et perpétuant la discrimination à l’encontre des communautés musulmanes et arabes. Il est impératif que tous les niveaux de gouvernement respectent les protections de la Charte et résistent à toute tentative d’éroder l’exercice légitime de ces droits par de fausses déclarations ou des interventions policières inutiles. »
Cette situation s’inscrit dans la continuation d’allégations vagues et infondées de « soutien au terrorisme » qui sont utilisées depuis des décennies pour justifier la surveillance, le maintien de l’ordre excessif et d’importantes violations des droits dirigées en particulier contre les communautés musulmanes et arabes.
Par exemple, au cours des derniers jours, des camps de protestation pacifiques sur les campus de l’Université McGill, l’Université de la Colombie-Britannique, l’Université de Toronto et l’Université d’Ottawa ont été attaqués à tort par des politicien.nes et des responsables comme étant « antisémites », « dangereux », « pro-Hamas » et en faveur du « terrorisme ». Les appels des étudiant.es manifestant.es à discuter de leurs revendications en faveur du désinvestissement et d’une paix juste avec les administrations universitaires ont été rencontrés par des demandes injustifiées d’intervention policière pour expulser les manifestant.es. L’implication de la police, comme en témoignent les récents efforts visant à nettoyer les campements sur des campus universitaires et collégiaux aux États-Unis, a souvent été à l’origine d’une escalade des tensions et de la violence, contrairement aux campements eux-mêmes.
Les tentatives visant à diffamer et discréditer les camps de protestation en les accusant d’exprimer leur soutien au « terrorisme » et de constituer une menace pour la sécurité publique surviennent après des mois d’accusations similaires dirigées contre des marches et des manifestations qui ont balayé les rues des villes canadiennes, entraînant des arrestations infondées, des contraventions injustifiées, et la restriction de la liberté d’expression.
La coalition exprime également sa profonde préoccupation face à la récente interdiction du keffieh à l’Assemblée législative de l’Ontario. Le keffieh est un vêtement courant et culturellement important pour les communautés arabes, et particulièrement palestiniennes. Quoi que l’on pense de l’interdiction des accessoires politiques dans les législatures, appliquer une telle règle aux vêtements ayant une signification culturelle est déplacé, réducteur et discriminatoire. L’interdiction du keffieh prive les Palestinien.nes et les Arabes de la capacité légalement protégée de s’engager dans des processus démocratiques, et propage le racisme.
L’interdiction envoie également un message dangereux selon lequel le keffieh est un vêtement inacceptable qui devrait être exclu des lieux publics. Cela a été récemment démontré dans une école secondaire d’Oakville, en Ontario, où un membre du personnel a demandé à un élève de retirer son keffieh parce qu’il lui faisait penser aux terroristes. L’interdiction du keffieh fait partie d’une tendance inquiétante selon laquelle les étudiant.es et les travailleur.ses font à nouveau face à des répercussions pour leur simple soutien aux droits humains des Palestinien.nes. L’interdiction du keffieh doit être annulée.
Alors que le bilan de l’attaque israélienne contre Gaza continue de s’alourdir, atteignant 34 000 personnes tuées et 77 143 blessées en date du 29 avril 2024, et que les mesures provisoires de la Cour internationale de Justice visant à protéger les Palestinien.nes de Gaza contre les actes de génocide sont ignorées, la CSILC réitère également son appel au Canada de non seulement faire pression pour un cessez-le-feu permanent, mais de mettre fin à toutes ventes d’armes, transferts et aide militaire à Israël. Un refus constitue une violation de l’obligation du Canada, en vertu de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir le génocide.
En résumé, la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles demande que :
- Les responsables cessent d’assimiler l’expression et la dissidence protégées par la Charte au « soutien au terrorisme », et s’abstiennent de demander aux forces de l’ordre de mettre fin ou d’empêcher les activités de protestation.
- Les forces de l’ordre s’abstiennent d’agir contre les manifestant.es exerçant leurs droits protégés par la Charte, y compris dans les campements.
- L’Assemblée législative de l’Ontario annule immédiatement l’interdiction du keffieh.
- Le Canada appelle à un cessez-le-feu permanent et mette un terme à toutes les ventes d’armes, transferts et aide militaire à Israël.